Entretien avec Catherine Barba (CB Group)

Fondatrice de Cashtore et de Malinéa, investisseur  dans plusieurs startups et auteure de l’ouvrage « Le magasin n’est pas mort  », Catherine Barba est une spécialiste reconnue du commerce connecté. Rencontre.

Bonjour Catherine !  Merci de vous prêter au jeu de l’interview. Vous êtes une actrice importante du e-commerce : pensez-vous que tous les commerçants sont voués à être aussi e-commerçants ?

Internet nous a habitués de façon structurante et irréversible à avoir le choix. Le choix du moment d’acheter, du support, du lieu ; le choix de la livraison (chez moi, en magasin, en point relais…). Pour un commerçant, honorer ce besoin passe par le déploiement d’un site marchand, et surtout d’un site mobile. On observe que cela permet aussi d’aller chercher des clients en dehors des horaires d’ouverture, de sa zone de chalandise (des clients d’autres départements) ; le digital fait grandir.

Si vous deviez résumer le comportement d’un acheteur, en 2014, face à un acte d’achat… que diriez-vous ? 
En 2014, on est des consommateurs tout le temps connectés, « infobèses », avec un besoin accru d’informations avant d’acheter, sans cesse désireux de nous exprimer – je like – de partager, d’être écoutés, de co-créer… Plus que tout, je crois qu’on a développé un besoin accru d’accueil, de considération, d’attention et de conseil personnalisé. Quelle exigence ! Pas facile, le client 2014 :-)

L’un des thèmes que nous traitons ici est le « web-to-store » : quelle est votre vision de cette pratique – encore peu maîtrisée par les « brick and mortar » ?
Quand on compare le taux de conversion sur un site e-commerce et celui d’un magasin, on comprend aisément que tout l’enjeu consiste à transformer le visiteur internet en client magasin. C’est là le véritable rôle d’un site e-commerce à mon sens : créer le désir d’achat et attirer le client sur le point de vente. Tous les marchands le savent, mais ils sont encore plus alertes dans la tête que dans les jambes ! Ce qui n’est pas satisfaisant aujourd’hui dans l’exécution : la plateforme e-commerce n’est pas adaptée, l’état des stocks en magasin n’y est pas mis à jour en temps réel, le mail d’alerte pour venir retirer son colis en magasin est très « robotisé », enfin le moment clé de l’accueil en magasin donne souvent l’impression d’être un client 2ème classe (pas de fléchage, pas d’accueil, pas de temps du vendeur…). Tout est dans l’exécution !

Capture d’écran 2014-02-10 à 11.35.40 AM

Les pure-players (e-commerçants, places de marchés, services…) sont parfois chahutés, peinent à trouver un modèle à la fois de croissance et de rentabilité : Pixmania, MisterGoodDeal, … pour n’en citer que deux. Quel est votre sentiment ? Erreurs de jeunesse du marché ? Vraie tendance de fond ?
À quelques belles exceptions près, je crois que les pure players vont se marginaliser. Je le constate au travers de mon activité d’investisseur : l’e-commerce est structurellement déficitaire. Rares sont les acteurs dont la marge couvre les charges incompressibles d’une activité e-commerce : production, logistique et marketing. Et on l’a dit, le client aime profondément avoir le choix, acheter en ligne, acheter en magasin, et l’on a besoin de lien social et de rapport humain. Je crois, moi aussi, que le souk de Marrakech vieux de 1000 ans sera encore là longtemps après Amazon.

Vous êtes en pointe sur les nouvelles tendances : pour 2014, quelles sont celles qui semblent arriver ou s’imposer au croisement du e-commerce et du retail ?
On commence à comprendre que le cross-canal, c’est une aventure d’entreprise toute entière qui demande à chacun de repenser sa façon de travailler. Si les coulisses sont organisées en silos, le client lui ne veut pas le savoir ! Il attend une cohérence, une fluidité totale entre tous les canaux. Et avec le sourire ;) Dans ce cadre, je vois les enseignes avancer aujourd’hui sur plusieurs chantiers, en priorité sur les équipes de vente, qui sont la pièce maîtresse de ce nouvel écosystème de commerce connecté. Il y a un travail très important à mener de sensibilisation, formation, équipement en tablettes, smartphones… Mettre les vendeurs à armes égales avec les clients est une nécessité pour muscler leur expertise. Et leur redire le bonheur d’être commerçant, d’apporter chaque jour de la considération, de l’attention, du plaisir, de l’émotion à ses clients.

Enfin, votre petit conseil pratique « qui fait la différence » pour un commerçant qui souhaiterait « dompter » le web pour développer son business ?
Souviens-toi que tu es avant tout un commerçant ! Ton empathie, ton amour du client, c’est ta grande force ! Le web n’est qu’une somme de nouveaux outils pour encore plus le satisfaire.

Merci Catherine Barba !

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